Épisode 12 – Construire un couple solide : conseils d’une thérapeute

Sumeya Karine, thérapeute de couple aguerrie, partage dans cet épisode des conseils éclairés pour construire un couple solide et durable. Forte de son expérience professionnelle, elle livre des clés pratiques pour instaurer une harmonie authentique au sein du couple.

Transcription

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Noureddy
Sumeya, salam alaykoum wa rahmatoullah wa barakatouh, que la paix soit sur toi.

Sumeya Karine
Wa alaykoum salam wa rahmatoullah wa barakatouh.

Noureddy
Comment vas-tu ?

Sumeya Karine
Ça va, alhamdoulilah, je te remercie.

Noureddy
Sumeya, peux-tu te présenter à nos auditeurs ?

Sumeya Karine
Ok, moi je m’appelle Sumeya, je suis thérapeute de couple spécialisée dans tout ce qui concerne la relation sentimentale. De ce fait, j’accompagne les couples et aussi les célibataires qui se préparent au mariage.

Donc les célibataires, qu’ils soient en phase de rencontre, que ce soit des parents solos… En fait tous les contextes peuvent s’offrir dans ce cadre.

Noureddy
D’accord. Qu’est-ce que tu peux nous dire par rapport aux différences entre les patients solos, donc parents solos, et tes patients célibataires et tes patients qui sont en couple déjà ?

Sumeya Karine
Alors il y a vraiment beaucoup de différences, après ça va vraiment varier selon les contextes. Déjà au sein même des couples, les contextes peuvent être différents.

Pour les célibataires qui n’ont jamais été mariés, ils peuvent avoir déjà entre eux des contextes différents. Et pour les parents solos, ils vont aussi avoir des contextes différents. Donc il y a vraiment des problématiques diverses et variées.

Pour les couples, en général, c’est retrouver une communication, retrouver un peu ce qu’on a perdu dans le couple, réapprendre à nourrir le couple. Ça va passer par pas mal de choses parce que tous les couples ne viennent pas avec les mêmes soucis non plus. Des fois, c’est des schémas très ancrés, donc on réapprend tout, on repart à la case départ.

Pour les couples, il y a aussi des choses qui se passent différemment, c’est que certains couples ne viennent pas en couple. Pour certains couples, j’ai un protagoniste du couple qui me contacte. Et du coup, là encore une fois, ça sera encore un suivi différent qu’en thérapie de couple. Donc en thérapie de couple, on va être sur des objectifs communs. A savoir, on a tous les deux envie de rester ensemble, mais on ne sait pas trop par où commencer. Des fois, ils viennent avec une problématique type de ce qui se passe chez eux, mais des fois, c’est un ancrage, donc on réapprend tout.

Pour les couples qui viennent séparément, à savoir soit la femme qui me contacte, soit le mari, alors ça ne sera pas une thérapie de couple, et je l’explique directement, parce que là, il y a une personne qui s’occupe d’eux. Donc la personne s’occupe de peut-être changer certains schémas, et voir si ça impacte son couple positivement. Et derrière ça, il y a des résultats positifs ou négatifs, c’est le ghayb (le monde invisible), il ne nous appartient pas.

Mais le suivi est complètement différent quand les personnes viennent en couple, à deux, avec un objectif, ou quand les personnes viennent seules, étant en couple. Et après, comme tu m’as dit, les célibataires, là c’est encore différent. Les célibataires, s’ils sont en phase de rencontre, souvent ils veulent gérer la phase de rencontre objectivement, parce qu’on sait que la rencontre sentimentale, c’est l’endroit où toutes les peurs reviennent. Donc ça va être des schémas inconscients qui ressortent.

Certains ont la conscience qu’ils ont du mal à gérer cette phase de rencontre, donc ils vont me contacter pour m’en parler, me dire un peu d’où ils viennent, et on va gérer cette phase de rencontre ensemble. Les personnes qui ne sont pas en phase de rencontre, donc encore un autre contexte, des personnes qui sortent, qui peuvent sortir d’une rupture, d’un deuil, soit un divorce, donc là il va falloir réapprendre à gérer le deuil, traverser le deuil avant de pouvoir être à nouveau dans une phase de rencontre. Donc là aussi il y a plusieurs étapes.

Certaines personnes ont juste ras-le-bol, cherchent à trouver « l’âme sœur ». Donc là on va partir sur encore des problématiques différentes parce que je vais vraiment m’attacher au contexte et à la personnalité de la personne qui me contacte. Et des fois la personne va me contacter avec un objectif bien précis. Et en fait au fur et à mesure de ce que la personne me raconte, on va commencer par autre chose parce qu’il y a des choses plus importantes avant d’arriver à l’objectif.

Donc tu vois, j’essaye de te faire ça en résumé mais tu comprendras qu’il y a vraiment énormément de… Dans la relation sentimentale il y a énormément de contextes qui peuvent se poser à toi.

Noureddy
D’accord. Voilà. En termes de ratio, tu croises plus souvent des gens en couple ou des gens célibataires ? Donc célibataires, vraiment, globalement.

Sumeya Karine
Oui, globalement. Des célibataires.

Noureddy
Des célibataires. Ah oui, intéressant. Ce n’est pas des couples que tu croises ?

Sumeya Karine
J’ai plus de célibataires qui me contactent que de couples.

Noureddy
D’accord, très bien.

Donc quels sont les problèmes récurrents des personnes célibataires qui viennent te voir ?

Sumeya Karine
Donc les problèmes récurrents, il y en a plusieurs, comme je te le disais il y a vraiment différents contextes.

Selon que ce soit des personnes célibataires tout court, des personnes célibataires en phase de rencontre, des personnes célibataires qui ont déjà eu une précédente relation et qui sont en phase de deuil, on va avoir des choses différentes à traiter.

Certains viennent avec des objectifs, et on va être obligé de passer par d’autres choses avant d’atteindre les objectifs. Pour les personnes qui sont en phase de rencontre, par exemple, ils vont être amenés à développer certains comportements dans la rencontre qui ne vont pas être servant pour eux dans cette rencontre. C’est-à-dire que, comme je l’expliquais, la relation sentimentale, elle va être l’endroit où les peurs vont ressortir chez l’être humain, parce que selon ce qu’on a vécu dans l’enfance, pour la faire très courte, on va amener des comportements différents dans la phase de rencontre, quand on est face à la gente opposée, ce qu’on appelle les styles d’attachement.

Et souvent, les personnes qui viennent me voir et qui sont en phase de rencontre sont dans des fonctionnements qui vont être désalignés. Ils vont avoir des interprétations qui vont être données selon leur style d’attachement. S’ils sont dans un style d’attachement anxieux, ils vont avoir tendance à surinterpréter une distance qui n’est pas une distance, par exemple. Donc l’avantage de se faire accompagner dans ces moments-là, c’est de reprendre une vision plus objective de la réalité, qui est souvent distante.

En fait, la réalité, elle est biaisée en fait. Elle est vue sous un axe de nos prismes et de nos peurs en fait. Et donc en phase de rencontre, c’est souvent ce qui se passe. Et il y a un moment aussi qui est un peu compliqué dans… la rencontre. Parce qu’en fait, une rencontre, il faut savoir qu’il faut qu’elle avance, sinon si elle stagne… c’est que ça va pas en fait parce que la rencontre elle est censée nous amener au mariage. Et il y a des personnes qui se rencontrent qui ne sont pas aptes au mariage au moment où ça prend des… où la rencontre commence à se faire vraiment concrète, où on commence à parler aux familles etc.

Il y a un des protagonistes qui peut faire demi-tour à ce moment là. Ça peut être dû à des peurs de l’engagement, ça peut être dû au fait que la personne réalise que c’est pas avec cette personne qu’elle va être finalement et que ça a été trop vite. Par moments c’est justifié, par moments c’est pas justifié. Ça peut venir du côté masculin ou féminin. Et c’est vrai qu’un accompagnement dans ces moments-là, c’est intéressant, parce que ça permet encore une fois de remettre une réalité plus objective, de remettre les choses en contexte, hors de la vérité disproportionnée ou hors de la vision qui est provoquée par ces peurs en fait. Ces styles d’attachement justement qui sont de l’ordre de l’anxiété. Que ce soit pour l’évitant ou le dépendant.

Justement l’évitant pourra faire demi-tour avant le mariage. Par exemple, on s’entend que ça commence à prendre une forme un peu trop… on commence à s’attacher, etc. Donc ça va inconsciemment. C’est très inconscient, il faut savoir que c’est très inconscient. Quand c’est conscientisé, on peut travailler dessus. Et justement, l’accompagnement, il est là pour amener en conscience, pour pouvoir justement rééquilibrer ses comportements et voir si nos ressentis sont de l’ordre d’une réalité ou de l’ordre d’une perception liée à nos peurs, tu vois ? Donc ça, c’est vraiment pour les gens en phase de rencontre.

Noureddy
Tu disais tout à l’heure que les personnes ont du mal à s’engager, donc il y a une peur du mariage ou que sais-je encore. Donc les rencontres dans la communauté musulmane, justement, dans mon esprit, c’est dans le but du mariage.

Sumeya Karine
Logiquement.

Noureddy
Logiquement. À ton avis, au bout de combien de temps faut sérieusement, donc au moment où les deux personnes se rencontrent, entre ce moment-là et le moment de s’engager, à peu près il faudrait combien de temps pour savoir que la relation est sérieuse et mènerait au mariage ?

Sumeya Karine
Alors, je ne vais pas donner une date pour pas que ça soit quelque chose de figé, mais je pense qu’à partir de trois mois, on sait si on a envie de s’engager.

Alors après, ça peut prendre du temps, parce que la logistique, parce qu’il peut y avoir quelque chose d’extérieur qui vient se mettre un peu au travers du chemin. Mais je pense que trois mois, quand on fait une rencontre consciente, c’est-à-dire qu’on rencontre la personne, on pose les bonnes questions, on est sur la construction, mais on n’est pas sur… on passe du temps, simplement. Le problème des rencontres aujourd’hui, c’est ça, c’est quand on n’est pas en train de mener la rencontre de façon constructive, mais on est en train de la mener de façon à passer le temps ou à remplir un vide qui est en nous. Et là, du coup, la rencontre peut prendre des fois même des années, ça fait très peur.

Donc je pense qu’au bout de trois mois, quand on est sur une rencontre constructive, on est à même de savoir si on a envie de s’engager avec cette personne. Après, il peut y avoir encore des étapes pour qu’on s’engage, mais ça ne doit pas durer trop longtemps.

Noureddy
Un phénomène qu’a décrit un sociologue ici en France, donc parlait essentiellement des hommes qui faisaient « du lèche-vitrine », c’est-à-dire qu’ils allaient dans les sites de rencontres, ils allaient dans les applis de rencontres, et donc qui se disent halal, avec pour but justement de mettre des gens ensemble. Mais on constatait donc, chez la gente masculine en tout cas, le fait de passer vite fait d’une personne à l’autre.

Est-ce que c’est quelque chose que tu as ressenti chez ta patientèle ? Est-ce que c’est des cas que tu as pu traiter ?

Sumeya Karine
Alors, c’est quelque chose que je ressens, que ce soit dans ma patientèle ou même à l’extérieur, parce qu’on vit aussi dans ce contexte.

Alors, ce n’est pas que chez la gente masculine. Effectivement, on aurait tendance à dire que c’est plus masculin, mais honnêtement, ça s’est répandu même chez la gente féminine. Et quand je constate un peu ce fonctionnement des personnes qui m’appellent, justement, on peut travailler aussi sur la façon de rencontrer et sur le fait de se dire « je rencontre selon mes valeurs et de façon consciente » .

Parce que le vrai problème justement des sites, c’est ça. C’est qu’on rentre dans une norme qui n’est pas une norme. Comme tu as parlé de « lèche-vitrine », je n’avais pas entendu ce terme, mais c’est ça en fait. On ne va pas parler avec une seule personne. Donc déjà, ce n’est pas éthique. Comment on peut se concentrer pour une Mouqābala (entretien, interview) si on parle avec plusieurs personnes ? Déjà pour moi, on n’est déjà plus du tout dans la Mouqābala. Et quand je parle de Mouqābala, bien entendu, je parle de réel. Pour moi, ces sites, s’ils sont un outil réel, ou ça a été le sabab pour qu’on soit en contact.

Noureddy
Alors, sabab pour nos auditeurs, c’est la cause.

Sumeya Karine
Oui, ça a été la cause pour nous mettre en contact. Que réellement, on prend notre téléphone tout de suite. Et pas qu’on passe des semaines à s’écrire un message parce que les messages, ça c’est encore un autre sujet, c’est une réalité biaisée, c’est une idéalisation qu’on fait de la personne en face, il n’y a pas de rencontre à ce moment-là.

Donc si on a dû passer par ce biais qui est le virtuel, je le déconseille, mais on va dire que ça a été un outil, une cause. je prends mon téléphone directement avec cette personne et je demande à la rencontrer directement. Donc après, selon les contextes, avec mon mahram, sans mon mahram, après je vous invite à voir les différentes écoles et les différents avis par rapport à ça, parce que chacun aura son contexte, mais dans tous les cas, de ne pas rester dans ce virtuel. Et ce virtuel, il mène à quoi justement ? À la consommation. Et homme ou femme.

J’ai eu des femmes, ça m’est déjà arrivé aussi d’avoir des femmes qui disaient « De toute façon, moi maintenant pour ne pas souffrir, je parle avec plusieurs personnes, et puis celui qui reste, ben… » En fait, c’est comment on a tordu nos valeurs pour ne plus souffrir, pour s’adapter au contexte qui n’est pas le bon. Et ça, c’est une grosse problématique. Et parmi les conseils que je donne, c’est vraiment de retourner à ces valeurs et à les appliquer, même si on est dans un contre-courant pas possible en réalité, parce que dans ce monde virtuel, une personne qui veut rester attachée à ses valeurs éthiques, qui veut parler avec une seule personne, c’est vraiment un contre-courant. Tu imagines, je ne sais pas, une espèce de chute d’eau. Et toi, tu essaies de la remonter. Et donc, il faut être très accroché et très préparé. Sinon, il ne faut pas passer par ces outils-là. Parce que c’est très dur de rester sur ces valeurs.

Et donc, ce problème que tu soulèves aujourd’hui, il est aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Et souvent, chez les femmes, c’est la cause, ce qu’elles disent, d’un comportement masculin. Mais après, l’un ou l’autre, on est tous responsables de ce qu’on a envie d’incarner comme valeur. Ça, c’est ce que j’invite à faire dans mes accompagnements.

Noureddy
D’accord.

Tu parlais de valeurs tordues, à un instant. Est-ce que tu peux détailler lesquels ? Qu’est-ce que tu avais en tête ?

Sumeya Karine
Alors, quand je dis « valeur tordue », alors c’est pas un jugement, c’est juste un constat, c’est que certains vont, en tout cas ceux qui m’appellent, sont là pour construire, parce qu’en général les gens ne se prennent pas la tête à se faire accompagner, sinon ils vivent leur vie, et en général les personnes qui m’appellent, c’est qu’ils remarquent qu’il y a un souci, ils ont envie d’aller vers un mieux, et mes accompagnements sont vraiment dirigés vers la réforme personnelle pour mieux aller vers l’autre.

Pour revenir à ce que tu me disais au niveau des valeurs, c’est que ces personnes arrivent avec un système de valeurs qu’elles m’exposent : « Je veux du sérieux, je veux me marier », etc. Que ce soit homme ou femme. Et quand je constate que ça peut passer par le virtuel en faisant ce que je viens d’énumérer, je suis obligée de ramener un retour à soi pour dire est-ce que tu te rends compte que ce que tu cherches, tu ne l’appliques pas en ce moment ? Oui, mais parce que tant que tu ne vas pas revenir à quelque chose d’éthique, à savoir « OK, je n’ai pas eu la chance d’avoir un bouche à oreille, je n’ai pas eu de présentation. J’ai décidé de tenter le virtuel. » Encore une fois, je ne suis pas vraiment pour. Il faut être très armé pour pouvoir passer par ce biais-là. Je dis que ces valeurs, elles sont tordues. Pourquoi ? Parce que les personnes vont commencer à parler avec plusieurs personnes à la fois. Elles vont parler avec potentiellement une personne tout à fait convenable. Mais du coup, il y a un appel de phare qui va se faire ailleurs. Et on va se dire, « tiens, là, il y a ça de mieux. Là, il y a moins d’enfants. Là, il y a… » Je vais te dire des bêtises, mais ça peut être ça. « Là, il est plus grand. Là, elle est plus belle. »

Et en fait… On n’est jamais focus sur une personne, on n’est jamais dans la rencontre. On est très très loin, et en fait c’est un leurre. Et les gens en fait, ils se sont fait avoir par cet amusement, c’est quelque chose qui vient nous enlever de quelque chose de droit, par le divertissement. Voilà, en fait le divertissement vient s’installer. Et on n’en a pas conscience pour certains. Certains le font très consciemment, mais ce n’est pas ceux qui m’appellent. Parce que quand on est dans ça, on n’a pas envie de consulter quelqu’un pour essayer de se marier. Mais ceux qui appellent en général, c’est là où je dis que les valeurs se distorsionnent en fait quelque part. Parce qu’on est sur quelque chose, on veut du sérieux. Mais on s’est fait happer par le courant de cette consommation et de ce peut-être qu’il y a mieux ailleurs en fait.

Et ça, à mon avis, c’est très grave. Et le temps passe.

Noureddy
De ce que j’ai vu, cette indécision de part et d’autre, chez l’homme comme chez la femme, justement, comme on n’est pas focalisé sur une personne, je vais dire ça, tu me dis si tu es d’accord ou pas, c’est qu’on va trouver des qualités chez une personne, d’autres qualités chez l’autre, etc. Et en fait, on a envie, en une seule personne, de retrouver l’ensemble des qualités qu’on a…

Sumeya Karine
C’est ça.

En fait… En fait, ce qui se passe un peu dans l’inconscient, c’est qu’on va chercher à idéaliser la future personne avec qui on a envie d’être. Et du coup, le fait d’être dans ce système de surconsommation, ça va favoriser le non-contentement, en fait. Et donc, à chaque fois, on cherche mieux, on cherche plus. Ah bah, il y a ça, il y a ça. Et puis, des fois, on regrette, mais c’est trop tard. Et en fait, on va chercher un peu. C’est comme si tu vas faire tes courses et tu vas acheter un paquet de riz et tu as une marque bien précise et tu as un truc bien précis. Et en fait, à force de critères. Et des fois, c’est des critères, ça c’est encore un autre sujet, mais à force de critères, tu ne trouveras jamais, parce que ça n’existe pas. Ça n’existe pas, et en fait, tu te perds. Tu te perds dans cette idéalisation et tu te perds aussi dans le passage d’une personne à l’autre.

Tu ne sais plus donner l’importance à l’être humain qui est en face de toi. C’est pour ça que je dis que le virtuel… il n’y a rien de mieux que le réel en fait. Après encore une fois, je comprends que le contexte actuel, il n’est pas évident que les gens n’ont plus leur place, que les rencontres à l’extérieur se font de plus en plus rares. Mais ce que je conseille, que ce soit les hommes ou les femmes, si vous décidez de passer par un contexte virtuel, sortez-en tout de suite. Ça doit être juste un sabab, juste une cause en fait pour se donner les moyens de rencontrer. Et la rencontre, elle n’existe que dans le réel, elle n’existe pas derrière un écran.

Je pense que le mot rencontre, il a vraiment tout un poids. Et on a dénaturé aussi le mot rencontre.

Noureddy
Chez ta patientelle, est-ce que tu ressens que les célibataires qui viennent te voir, ils acceptent cette idée de se mettre avec une personne, aussi imparfaite puisse-t-elle être, dans l’idée, donc dans un futur plus ou moins proche, qu’on va s’adapter l’un l’autre et puis qu’on va s’améliorer ensemble ? Est-ce que c’est une mentalité qui existe chez ta patiente ?

Sumeya Karine
Oui, quand ils appellent, en général, ils sont dans cette mentalité. C’est-à-dire qu’après les prises de conscience, parce qu’encore une fois, le but, c’est qu’on se rende compte de la réalité dans laquelle on est, du contexte dans lequel on se trouve. On va un peu voir… Moi, je vais faire attention un peu à la personnalité que j’ai en face de moi. Une fois que ça, ça a été vu, le contexte posé, on peut mettre en avant les dysfonctionnements. Et en général, les gens qui appellent, ils ont envie d’aller vers un mieux.

Donc après, ils peuvent se rendre compte qu’effectivement… Il y a peut-être des choses plus importantes que d’autres. Et après, ce sera au cas par cas. Pour certains, des choses qui sont très importantes, pour d’autres, moins. Et c’est là où je te dis, c’est très personnalisé. Je n’ai pas une formule. C’est pour ça que je te disais tout à l’heure, les contextes sont divers et variés. Et je ne peux pas avoir une formule que je vais proposer à tout le monde. C’est impossible. C’est vraiment au cas par cas. Et au cas par cas, oui, les gens qui appellent, ils ont envie d’aller vers un mieux.

Donc, il y a le retour à soi, il y a la prise de conscience. C’est des étapes de l’accompagnement. Et après la prise de conscience, on peut commencer à faire un plan de « comment on va envisager une rencontre ». Et là ça va passer par tous ces points là de ne pas être dans l’idéalisation, de ne pas chercher trop, de chercher ce qui est important, parce qu’on ne peut pas non plus renier ses besoins, ses valeurs. On va mettre vraiment les choses importantes en avant pour la rencontre.

Il faut savoir que les valeurs ça va avoir beaucoup de poids aussi, retourner à ses valeurs. Des fois on est perdu justement ces valeurs qui reviennent aujourd’hui dans ce schéma de rencontre. Il va falloir se les réapproprier et se les ancrer et les vivre aussi au quotidien parce que c’est bien beau d’avoir des valeurs mais si on ne les incarne pas, on ne peut pas rencontrer la personne en face qui incarne aussi nos valeurs, tu vois ?

Noureddy
Donc là, on parlait des personnes qui s’engagent dans la vie maritale. Qu’est-ce que tu peux nous dire par rapport à ceux qui se sont mariés, qui ont divorcé ou les personnes endeuillées ?

Sumeya Karine
Alors là aussi, ça va faire l’objet d’un suivi particulier.

Donc des personnes qui sortent d’un divorce, ou bien qui sont divorcées depuis un certain temps, mais qui n’ont pas fait le deuil, et qui vont me contacter. On va travailler justement sur cette phase de deuil, avant de pouvoir se poser pour rencontrer. Parce que certains, justement, dû au style d’attachement, ne veulent pas rester seuls, mais ils ne sont pas encore prêts en fait. Mais ils ne le savent pas. Et donc là aussi, on va mettre en avant leur style d’attachement, souvent. Jusqu’à ce qu’il y ait une prise de conscience qu’il faut prendre le temps de faire le deuil, il y aura des étapes, on verra ensemble dans l’accompagnement. On va prendre le temps de ces étapes et chacun va traverser ces étapes différemment.

Mais ce qui va être important, c’est d’avoir la conscience que tant que je ne suis pas sorti de cette phase de deuil, si je suis encore très en colère, si je suis encore très triste, il ne faut pas tout de suite s’engager dans une rencontre. Et ça, avec la personne qui sera au téléphone ou en réel, on va en parler. Et derrière ça, une fois que les phases sont « bouclées », une fois que la phase de deuil est plutôt terminée, on peut revenir à soi tranquillement, objectivement sans comparaison de ce qu’on a vécu. Parce qu’en fait c’est ça, quand on n’a pas fait le deuil et qu’on veut juste combler un manque on va être désaligné dans notre rencontre on va être avec quelqu’un pour être avec quelqu’un et c’est du côté masculin ou féminin.

Et forcément ça ça peut faire des dégâts parce que derrière c’est ce qu’on appelle la relation tampon, on peut se marier très vite. Mais ça ne va peut-être pas tenir, parce qu’au final, on ne s’est pas mariés pour des bonnes raisons. On s’est mariés parce qu’il y avait un vide. Donc il faut d’abord travailler sur ce deuil pour combler ce vide. Et ensuite, bien sûr, c’est humain d’avoir envie de se remettre en couple, il n’y a pas de souci. C’est très légitime, mais il faut d’abord traverser cette phase de deuil, à mon sens, pour pouvoir se remettre en couple. Donc vraiment, pour les personnes qui sortent d’un divorce, on va vraiment mettre l’accent sur ça.

Je vais vérifier avec les personnes. Certains sont divorcées, ils ont déjà passé la phase de deuil, il n’y a pas de souci. Et dans ce cas-là, ça serait d’autres problématiques, parce qu’elles se disent, par exemple, des mamans solos ou des papas solos, certains ont été longtemps en couple par exemple. Donc ils vont réapprendre avec le nouveau contexte, avec les nouveaux codes. Ça va être un réapprentissage, mais dans ces moments-là, le fait de se sentir accompagné, c’est souvent, on se sent moins seul, tu vois ? Il y a beaucoup de parents solos qui se disent, bon alors je vais citer les mamans, mais les papas sont aussi sujets à ça, mais ils ont chacun leurs problématiques.

Les mamans, c’est très dans le traditionnel. « Oui, mais personne ne se marie avec une femme qui a déjà des enfants », etc. Donc là vraiment, j’invite à se réapproprier les richesse de ce qu’on a vécu, de nos expériences, parce qu’à un moment, Allah il nous éduque au travers de nos expériences. Il ne faut pas l’oublier. Que ce soit pour un maman ou un papa, c’est comment aujourd’hui tu as cette maturité qui pourrait être très bénéfique pour un nouveau couple, et l’homme qui te correspond le sait déjà. Donc ne t’attarde pas sur des personnes qui ne trouvent pas que c’est une richesse.

Comment reprendre confiance ? C’est vrai que dans mes accompagnements, il y a aussi beaucoup ça. C’est le retour à soi, à reprendre une certaine estime de soi. Et là je vais m’expliquer parce qu’on parle beaucoup de développement personnel, je ne suis pas du tout dans ce monde-là. Je parle de Tazkiyat an-Nafs (purification de l’âme), c’est revenir à soi, à la lumière de ce qu’Allah a mis en toi. Parce qu’Allah a mis des choses à tout le monde. Il y a beaucoup de personnes, quand ils sortent d’un divorce, quand ils sont seuls depuis trop longtemps, il y a ce manque de confiance qui commence à s’installer, ce manque d’estime, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes. Et là on va travailler aussi sur ce retour à la lumière de ce qu’Allah a mis en toi en termes de qualité. Parce qu’Allah est juste, il ne va pas tout donner à l’un et pas à l’autre.

Donc là, on va vraiment travailler sur cet axe-là. Et c’est une fois qu’on reprend un peu « son potentiel », qu’on est en mesure de mieux apporter à l’autre. Donc le but, c’est vraiment, « je reviens à moi, parce que je serai en mesure de mieux choisir, et je serai en mesure de mieux apporter ». Le but, c’est le couple, tu vois.

Donc en fait, dans tous ces cas-là, que ce soit des gens en phase de rencontre, que ce soit quelqu’un qui sort d’un deuil, que ce soit papa solo, maman solo, il va y avoir ce retour, pour mieux aller vers l’autre. Et vraiment, l’intention, quand on dit « [les actions ne valent que par leurs intentions] », ça prend vraiment tout son sens. L’intention que tu mets dans l’accompagnement va te donner un résultat différent, selon l’intention que tu vas y mettre. Si tu reviens à toi en pensant que tu vas écraser tout le monde, et que ça t’est dû, et que toi, tu es au-dessus des autres, je ne peux pas t’accompagner dans ce sens, tu vois ? Et pourtant, on pourrait dire, mais c’est la même chose, et ça n’a rien à voir, parce que dans ma niyya (intention), je sais que je vais valoriser ce qu’Allah a mis en moi, donc déjà, c’est vertical, ce n’est pas horizontal, et ça ne m’appartient pas. Donc déjà, je suis humble devant ce que je vais retrouver en moi, et ce potentiel-là, je vais mieux choisir, et je vais en faire profiter l’autre.

Et ça, je pense que c’est une vision qu’il faut vraiment se réapproprier en tant que musulman, et en tant qu’être humain, dans la rencontre. Si on sort un peu, parce que justement, les blessures, qu’est-ce qu’elles vont nous faire faire souvent, c’est qu’on est dans un déséquilibre total. Des fois, on n’a pas confiance en nous, mais des fois, on passe dans un extrême du « Ouais, mais c’est pas normal qu’on fasse ça, moi je ne mérite pas ça, etc. » En fait, on va passer de l’un à l’autre. C’est les montagnes russes, parce qu’il n’y a pas cet équilibre. Parce qu’on n’a pas encore travaillé profondément ce qu’on a en nous, et pourquoi on le travaille, et pourquoi on le met à disposition de l’autre. Je ne sais pas si tu vois ce que je veux dire ?

C’est une nuance qui est hyper importante dans mes accompagnements, c’est vraiment un point sur lequel j’appuie beaucoup. Et les papas, ce que je leur dis aussi, parce que certains papas aussi, il y a des procédures de divorce qui ne finissent pas, c’est très très compliqué. Je vais te parler de ça, même si tu ne m’as pas posé la question, parce que je pense que c’est important, parce que tes podcasts sont vraiment dirigés aussi vers les hommes, vers les papas.

On n’a pas le même rôle dans la rencontre des hommes et des femmes. On n’a pas le même rôle. Et aujourd’hui, parmi les grosses difficultés de rencontre, c’est aussi le fait qu’on a perdu nos places. C’est-à-dire que l’homme perd sa place, la femme perd sa place. La femme n’est plus dans son énergie féminine et l’homme est de moins en moins dans son énergie masculine. Alors, je ne vais pas pointer du doigt les uns ou les autres. La société fait que, aujourd’hui, on est dans une « chakchouka » (bazar) pas possible, on est dans un micmac pas possible. Donc, c’est important pour les femmes d’être dans l’accueil, tout en étant conscientes de tout ce qu’on a dit avant, retour à soi, etc. Et pour les hommes, c’est important d’être ancré et sécurisant.

C’est-à-dire qu’un homme qui engage une rencontre, c’est à lui de la mener. En fait, il ne doit pas attendre comme un enfant, comme quelqu’un d’insécure. C’est pour ça qu’on travaille les styles d’attachement. Parce qu’un homme insécurisé, il passe dans une énergie féminine. Et donc la femme en face va prendre la place de l’homme pour se mettre dans l’action, pour les rencontres, pour se voir, pour… tu vois ? Donc ce qui va être important, c’est que l’homme reprenne sa place. Et pour reprendre sa place, il faut d’abord qu’il reprenne confiance en lui, à la lumière encore une fois de ce qu’Allah a mis en lui. Et ensuite, qu’il sécurise la rencontre. C’est-à-dire, « j’ai envie de rencontrer cette sœur. OK. Qu’est-ce que je mets en place ? Je n’attends pas que… Peut-être qu’il faut que j’attende ». Non ! Fais les choses, sois un homme. Ancre-toi !

Parce que sache que la posture que tu vas prendre dans ta rencontre, que tu finisses marié avec elle ou non… C’est la place que tu auras dans ton couple. Parce que la place que tu vas avoir dans ton couple, tu dois déjà l’incarner dans ta rencontre. Tu vois ? Et ça, c’est vraiment un point très très important pour les hommes. Prenez votre place. Soyez sécurisant. Et être sécurisant, ça veut dire la rencontre, elle avance. On ne fait pas du sur place. On n’est pas là juste pour se demander comment on va. En fait, on construit. Et je montre à la femme qui est en face de moi que oui, j’ai envie de me marier. Alors, une rencontre, on ne sait pas si ça sera elle, effectivement, ça ne nous engage pas. Mais en tout cas, on montre… On a un objectif de mariage. Ça, ça sécurise, ça met un cadre.

Et en face, les femmes, ce que je leur demande, c’est d’être accueillantes. C’est-à-dire que vous rencontrez un homme, s’il pose le cadre, s’il est sécurisant, montrez-vous accueillante. Après, encore une fois, ça sera lui ou ça sera pas lui, mais que chacun retrouve son énergie, ça va vraiment faciliter les mariages et la rencontre.

Encore une fois, vraiment, quand on inverse tout ça, il faut pas s’étonner qu’après, dans le couple, plus personne n’a sa place. Vous pouvez pas demander en tant qu’homme de ne pas prendre votre place dans la rencontre. Je vais vous donner un exemple très concret. Un homme qui est dans une rencontre avec une femme, et la femme va gérer toute la rencontre. C’est-à-dire que c’est elle qui propose. C’est elle qui dit, on va voir les familles. C’est elle qui, en fait, elle met tout en place. Et lui, il se laisse aller. Et demain, il se marie, il veut prendre sa place. Il veut poser un cadre, il veut dire, « c’est moi le chef de famille ». Mais tu ne pourras pas. Parce que toute cette rencontre, c’est elle qui a pris les choses en main. Tu vois ce que je veux dire ?

Et là, en fait, il faut y penser avant. Se rappeler que ma rencontre… c’est le schéma que je vais avoir dans mon couple. Donc après, à chacun de se poser la question, qu’est-ce que j’ai envie d’incarner dans mon couple aussi ? Et là, on revient aux valeurs et à l’énergie masculine pour les hommes et l’énergie féminine pour les femmes. Je pense que ça, c’est vraiment super important.

Noureddy
D’accord. Donc, s’il y a une idée qu’il faut retenir par rapport à ce qui a été dit, c’est que le rôle de l’homme dans la rencontre, c’est vraiment de donner cette image de personne qui est capable de protéger, j’ai envie de dire.

Sumeya Karine
Tout à fait.

Noureddy
Et la femme doit donner cette image à l’homme de… d’accueil, de chaleur ?

Sumeya Karine
C’est ça. À partir du moment où je vois que tu sécurises, moi je suis très accueillante. C’est le rôle de la femme en fait.

Et le Qawāma qu’on décrit dans le Coran, il a été défini, alors pas par moi, mais ceux qui font vraiment l’exégèse, le Qawāma c’est le fait de donner la protection à la femme. La protection, elle est physique, elle est psychique, elle est financière, elle est émotionnelles. En fait, je suis là. Et de là, la suite du verset, la femme, au passif, va lui donner cette obéissance. Pourquoi ? Parce qu’on est sur quelqu’un qui n’est pas en train de servir son nafs. On est sur quelqu’un de Qawām. C’est une responsabilité énorme qu’Allah vous a donnée. Il faut l’incarner.

Il faut l’incarner, quand bien même, parce que le problème, c’est que certains disent « oui, mais je ne sais pas si ça va arriver » . Mais tu incarnes ce que tu veux, parce que tu es dans une rencontre. Donc, ton objectif, c’est le mariage. Effectivement, tu ne sais pas si tu te marieras, parce que tu n’as pas encore fait les rencontres, mais tu incarnes ça dès maintenant. Tu vois ? Parce que, sobḥān Allāh, c’est ton rôle, c’est ton rôle maintenant, c’est ton rôle dans ton futur couple.

Et la femme, pareil, si vous avez un homme qui sait se montrer qawām, qui sait se montrer protecteur, qui sait se montrer sécurisant, vous êtes dans l’accueil, vous ne pouvez pas être dans les chichis, en fait, tu vois ? « Non, je vais me faire désirer. » Non, non, non, il n’y a pas de jeu. Il est comme ça, moi je me montre comme ça. Après, je ne cours pas, je suis dans l’accueil, c’est différent.

Noureddy
D’accord, donc c’est un devoir l’un envers l’autre, en fait. L’homme, donc lui fournit donc la sécurité matérielle, la sécurité financière, la sécurité même psychique et émotionnelle.

Sumeya Karine
Psychique et émotionnelle. C’est très important ! Parce qu’on l’oublie ça.

Noureddy
D’accord. Et donc, en contrepartie, c’est un petit peu comme un commerce, comme une transaction commerciale, avec un contrat qui lie les deux parties, des obligations pour l’un, des obligations pour l’autre.

Sumeya Karine
C’est ça.

Noureddy
Donc, si l’homme fait sa part du contrat, j’ai envie de dire, à la femme aussi, de faire sa part du contrat.

Sumeya Karine
C’est ça.

Et naturellement, ça se fera, parce que ce que je veux dire, ce contrat-là, c’est Allah qui nous le propose, en fait. Et qui peut proposer le meilleur des fonctionnements que le Créateur ? Parce que ça, ça ne vient pas de ma tête, c’est le verset. Et on va jusqu’à la fin du verset. À ne pas interpréter comme « l’homme c’est un dictateur ». Non, ce n’est pas possible.

La femme, de par nature, elle a la rahma (miséricorde), c’est sa nature. C’est-à-dire qu’une femme, après je parle de personnes saines, attention, il y a toujours des exceptions hommes ou femmes. Là, je rentre vraiment dans un cadre de personnes saines qui ont envie d’avancer sainement. Donc il y a peut-être des choses à travailler, mais quand on est sain, on y arrive. Donc une femme, naturellement, elle est tournée vers la rahma. Si un homme a ce côté de protection, de tout ce qu’on a énuméré en termes de protection, naturellement la femme, elle le fait. Parce que c’est intrinsèque, c’est à l’intérieur de nous en fait, tu vois ? Donc cette douceur, elle va ressortir, tu vois ? Et là, c’est parce que chacun, encore une fois, je parlais d’énergie, mais ça, chacun sera dans son énergie. Et encore une fois, c’est pas moi. Le contrat, c’est pas moi. C’est Allah, tu vois ?

Donc non, on ne peut pas venir s’interposer sur ça et prouver qu’on a un système de fonctionnement qui serait meilleur que celui-là, en fait. Mais le problème aussi, c’est qu’on aime se plaindre. C’est pour ça que dans mes accompagnements, j’arrive toujours à revenir à soi d’abord. Revenir à soi, c’est aussi prendre conscience de ses failles, prendre conscience du fait que des fois, ce qui se passe en face de moi, c’est parce qu’aussi je peux provoquer. En fait, c’est reprendre un peu cette responsabilité de ce que j’ai envie de donner, de ce que j’ai envie de poser. Je suis comme ça avec mes valeurs, ma personnalité. Je ne vais pas plaire à tout le monde, il n’y a pas de souci. Je reste dans la bienveillance, dans le respect et je continue d’incarner mes valeurs. Homme ou femme, tu vois ?

Et pour moi, ça c’est un… C’est comme une espèce de carte pour avancer bien. Et chacun va avoir sa propre carte finalement. Selon ce qu’il est, selon son contexte, comme je disais tout à l’heure, ça répond à ce que tu m’as demandé au début, le contexte, la personnalité. À la fin, c’est comme si tu sors d’un accompagnement avec ta propre carte.

Noureddy
Pour t’aider à naviguer.

Sumeya Karine
C’est ça, avec ta boussole.

Noureddy
Sur cette mer qui s’appelle la vie de couple.

Sumeya Karine
Exactement.

Noureddy
D’accord, très bien. On va passer donc aux couples qui te consultent. Qu’est-ce que tu peux dire par rapport à leurs problèmes ? Quels sont les problèmes récurrents des couples qui viennent te voir ?

Sumeya Karine
Alors, encore une fois, comme je t’ai dit, des fois ils sont deux, des fois ils ne sont pas deux.

Alors quand ils sont deux, on va dire que quand ils sont deux, c’est plutôt positif, parce que quand ils sont deux, ils ont envie tous les deux. Donc l’objectif commun, c’est que ça se passe mieux. Pour x ou y raisons, ça ne se passe plus bien. Que ça soit l’intimité, que ça soit la communication, on s’éloigne. Et de toute façon, tout est imbriqué. Alors on aime trouver des causes extérieures, on aime dire que c’est parce qu’on visite pour la belle famille, on aime dire que c’est un problème d’argent, des enfants, j’en sais rien.

Mais en réalité, il y a un socle pour le couple. Donc reprendre chacun sa place, on réapprend dans le couple à prendre sa place. Des fois, une femme peut se plaindre que son mari ne fait pas assez, par exemple. Je vais te donner vraiment des conséquences. « Mon mari ne fait pas assez. » « Ok, mais est-ce que tu lui laisses ? Est-ce que tu lui donnes sa place ? » Et là, on réapprend, on reprend les schémas. Et donc, ça peut être des schémas à reprendre, où chacun reprend sa place. Mais dans tous les cas, ce qu’on va travailler dans le couple, c’est comment le nourrir, comment redonner l’importance à cette entité qui est le couple, qu’on ait des enfants, qu’on n’ait pas d’enfants, peu importe.

Se rappeler pourquoi on s’est choisis. On va vraiment mettre en avant, faire ressortir ces émotions, parce qu’on est des êtres rationnels, mais pas que, on est aussi des êtres émotionnels. Et l’être humain a besoin de vibrer dans son couple, comme il a vibré quand il s’est rencontré, quand il a décidé de s’engager. Et quand on s’engage, ce 1 + 1, comme j’aime à le dire, devient 3. 1 + 1 = 3, pourquoi ? Parce que mon individualité, ma personnalité, plus la tienne, à part entière, on va construire une nouvelle entité. Et de ce qu’on va grandir nous-mêmes personnellement, on va l’apporter au couple, en fait, naturellement. Et donc, ce qu’on va voir quand les couples viennent le voir, c’est réapprendre déjà à comprendre ce qu’est le couple. On va déjà redéfinir le pourquoi on s’est choisi, etc. Des fois, il se peut qu’on ne s’est pas choisi pour les bonnes raisons, que ça va être compliqué.

Parce que le but de la thérapie de couple, soit on part bien ensemble, soit on reste ensemble bien, soit on se sépare bien. Parce que ce n’est pas dans nos mains. Nous, on est juste l’outil, tu vois. Mais pour certaines personnes, ils se sont éloignés ou ils ne se sont pas choisis pour les bonnes raisons et ils n’ont plus rien à partager. Donc on va essayer de mettre plein de choses en place avant de s’en rendre compte. Mais bon, le but c’est vraiment de rester bien, que ce soit ensemble ou non.

Donc comme je te disais, la base ce sera de réapprendre ce qu’est le couple, réapprendre à nourrir le couple. Moi j’axe beaucoup aussi mes accompagnements sur les langages de l’amour. Pour moi c’est un outil qui est très très puissant. J’invite les personnes qui pourront écouter à… à se procurer le livre de Gary Chapman qui s’appelle « Les langages de l’amour » . C’est des conférences que j’ai faites souvent. Mais là, je ne vais pas l’étaler. Mais en gros, avec le livre, déjà, vous avez pas mal de choses. Et c’est, même pour ceux qui n’aiment pas lire, c’est un livre très facile à lire. C’est un outil pragmatique, concret, à mettre en place tout de suite.

Donc, « Les langages de l’amour » , c’est quoi ? C’est le fait de travailler sur le réservoir émotionnel du partenaire. Comment je fais des choses qui le remplissent ? Comment il se sent aimé ? Comment je parle son langage ? Et vice-versa. Donc on réapprend. Et la thérapie de couple en soi, quelque part, c’est un moment qu’on se donne pour le couple. C’est une façon de dire, c’est une priorité quand même pour nous parce qu’on a envie de s’en occuper. Et c’est ça qui est très positif dans la thérapie de couple, c’est que peu importe ce qui va se passer, on a déjà donné tous les deux la valeur à ce qu’on a envie. Parce que pour consulter quelqu’un, il faut quand même… Il faut se donner les moyens, certains ne vont pas, ils ne se disent pas on va consulter, ils se disent c’est des problèmes internes, on va les laisser en interne, et c’est encore très tabou dans la communauté d’aller consulter à l’extérieur. Donc ceux qui sont déjà à deux pour travailler sur le couple, c’est déjà très positif, parce qu’à partir du moment où il y a l’envie, on peut faire beaucoup de choses.

Et sinon, les couples que j’accompagne quand ils ne viennent pas ensemble, du coup, ça ne sera pas une thérapie, ça sera un accompagnement. Donc soit la femme qui me consulte toute seule, soit l’homme qui me consulte tout seul. Là, c’est un peu plus compliqué. On va dire que c’est différent, c’est-à-dire que déjà, j’explique à la personne qui me contacte que ça ne sera pas une thérapie de couple. Donc la personne, déjà, je suis obligée de voir le couple sous son prisme unique. Donc c’est très différent. Et ensuite, c’est la personne qui me contacte qui va être amenée à faire… ce qu’on peut appeler des efforts, retravailler sur son comportement, la place qu’elle prend dans le couple, qu’elle ou il, comment il ou elle peut nourrir ce couple, parler des langages de l’amour à son partenaire, et de là…

Parce qu’en fait, tout marche par schéma, comme je t’ai dit tout à l’heure. Donc, il y a un schéma qui est installé, souvent c’est un schéma qui n’est plus constructif. Donc, il va falloir désamorcer le schéma pour reprendre un nouveau schéma qui va être plus constructif et qui va nous permettre d’être nourris dans ce couple. Donc, quand tu viens tout seul ou toute seule, tu vas être… en charge de transformer le schéma, de mettre cette graine dans le rouage pour que ça reparte dans un autre sens. Donc c’est plus compliqué, tu es tout seul.

Il faut avoir envie, il faut être prêt ou prête, parce que c’est dit dès le départ, il n’y a pas de pouvoir sur l’autre. Si l’autre n’a pas décidé de venir, ou si l’autre n’est même pas au courant que tu viens, parce que des fois ce n’est même pas dit, pour x ou y raison, tu vas être en charge de prendre la responsabilité de ton couple à ce moment-là, et après à chacun. La patience que tu auras. C’est très positif parce que si Allah a donné cette responsabilité à toi, c’est aussi un honneur quelque part. Il ne faut pas le prendre comme « mais pourquoi c’est moi ? » La personne qui m’appelle, elle ne peut pas me dire ça parce que je veux dire « c’est toi qui m’appelles, c’est toi qui as ce besoin. » Je ne peux pas travailler sans son consentement.

Donc la personne va travailler sur ses schémas et ça peut avoir des effets très positifs parce que l’autre se rend compte qu’il y a des grands changements. Et l’un comme l’autre, des fois après, peuvent venir à deux. Du coup, des fois, ça peut faire un changement positif.

Et des fois, on peut se rendre compte que les personnes vont divorcer parce qu’en fait, la personne qui m’appelle… Ça m’est déjà arrivé, pour exemple concret, des personnes qui m’appellent et le schéma se remet tout à fait bien, la personne est super contente et voilà, il y a tout qui repart.

Et puis ça m’est déjà arrivé le cas inverse où la personne se rend compte qu’elle n’a rien à faire avec cette personne parce qu’on est dans un schéma très toxique où il y a de la maltraitance psychologique, etc. Mais la personne, il fallait qu’elle passe par ces étapes pour s’en rendre compte, c’est-à-dire pour ne pas regretter.

La personne qui me contacte toute seule, en général, je dis, là, ce qui va être important, c’est que tu fasses des sababs, tu fasses des causes pour voir ce qui peut s’améliorer, et voir jusqu’où tu peux aller, et que tu prennes une décision en conscience pour ne pas regretter, pour ne pas rester par dépendance, et pour ne pas non plus quitter par colère.

Donc encore une fois, soit tu décideras de rester bien, soit tu décideras de quitter bien, sans regret. Tu vois, il y a vraiment toutes ces étapes qui vont être…

Noureddy
D’accord. Tu as d’autres cas aussi que tu traites par rapport aux couples que tu reçois ?

Sumeya Karine
D’autres cas, c’est-à-dire ?

Noureddy
D’autres cas récurrents.

Sumeya Karine
Franchement, là, je pense que je t’ai parlé de ceux qui viennent seuls, c’est justement pour ceux qui ne sont pas, ou l’autre n’est pas au courant, mais ça peut être aussi que l’autre est réfractaire à ce genre de pratiques, en fait.

Certaines personnes sont encore très… encore une fois, comme je dis, c’est tabou pour eux d’aller consulter, donc voilà. Et ceux qui viennent ensemble, en général, j’ai pas trop de… de soucis, c’est toujours la même chose comme je t’ai dit, soit on communique plus, soit il n’y a plus d’intimité, soit les enfants nous prennent trop de temps, on ne sait plus comment gérer.

Il y a un tas de problématiques du quotidien, mais la réalité, c’est ce que je t’ai dit, c’est que les bases, ça sera toujours les mêmes. C’est redonner un temps au couple, nourrir ce couple, parce qu’on néglige… j’ai parlé des langages de l’amour, mais c’est vraiment très puissant comme outil, vraiment. Parce que l’être humain, quand il se sent nourri émotionnellement, c’est comme si, je ne sais pas, tu as un meilleur ami. C’est quelqu’un à qui tu as toujours tout confié. Et tu sais que quand tu as une galère, directement, après que tu aies levé tes mains vers Allah subḥānahu wa ta’ālā (formule de glorification), bien sûr, tu te diriges vers cette amie, tu sais que tu seras toujours accueilli.

Le couple, il faut refaire cette bulle sécurisante. Et le fait de nourrir ce couple, travailler sur le réservoir émotionnel, comme je l’ai dit tout à l’heure, parmi ses outils, il y a les langages de l’amour. Quand tu retravailles sur ça, tu te sens nourri émotionnellement, tu as naturellement envie de te tourner vers l’autre. C’est l’autre qui est un peu… Au-delà de ce que tu t’apportes seule, c’est l’autre qui est un peu ton essence, c’est ton réservoir.

Et en fait, ça, pourquoi je t’ai parlé de ça ? Parce que ça, ça va venir traiter toutes les problématiques en réalité. Parce que c’est une base. Tu vois, sans cette base, tu pourras traiter, oui, on peut traiter des cas pragmatiques, on va trop chez la belle famille, moi j’aimerais qu’on y aille moins. Tout ça, c’est des choses, tu vois, c’est superflu, j’ai envie de te dire. Parce qu’en réalité, quand tu as travaillé ça, ce que je t’ai dit là, le reste va se faire tout seul parce que la bienveillance va s’installer. On a envie d’être à l’écoute de l’autre naturellement, c’est lui qui nous fait du bien, c’est elle qui nous fait du bien.

Donc on va être à l’écoute, on va mettre cette bienveillance en marche, et on va être en mesure de traiter toutes les problématiques, on va communiquer mieux. Alors je ne dis pas qu’il n’y aura plus de désaccord, on n’est pas des clones, il y en aura, et les désaccords font partie du couple, et de la construction du couple, parce que savoir gérer un désaccord, c’est savoir grandir avec l’autre. Quand on n’est pas capable d’avoir un désaccord, il y a un souci.

Donc, le fait de se nourrir émotionnellement, ça va nous permettre, non pas de plus être en désaccord, mais de mieux gérer ce désaccord, de pouvoir être à l’écoute de l’autre. On peut rester pas d’accord, mais on sait que c’est pas une séparation pour nous, on peut juste ne pas être d’accord sur un point, tu vois. Donc ça va nous amener à gérer tous les soucis du quotidien avec beaucoup plus de recul et d’objectivité, tu vois ? Parce qu’on est nourri à côté. Je sais pas comment te dire, une personne qui est nourrie, C’est comme un homme, tu vois, ça se passe pas bien au taf et tout, et puis ça commence à lui peser sur les épaules parce qu’il passe beaucoup de temps dehors, tu vois, miskine (le pauvre). Et en fait, chez lui, c’est la galère aussi. Et bien quand il va se sentir nourri chez lui, tout ce qui se passe dehors, non pas qu’il n’y aura plus d’épreuves, mais il sait qu’il y a un endroit où il va se ressourcer.

Il faut faire en sorte que l’endroit où on se ressource, ça soit chez nous, ça soit dans ce couple. Ça, je t’ai parlé de cette entité qui est le couple, il faut la nourrir, c’est super important. Tu vois, on arrose les plantes naturellement pour qu’elles grandissent. Le couple, on a tendance à penser qu’une fois qu’on est ensemble, ça y est, le mariage c’est un but en soi, c’est la fin. Le mariage c’est le début, et ça on a oublié. Le mariage c’est là qu’on va commencer quelque chose.

Il faut se préparer à être en désaccord, il faut se préparer à la remise en question. Il faut se préparer à ce que ça pique, parce que l’autre il va être un miroir pour nous faire refléter tout ce qui ne va pas chez nous. Il faut être prêt. Si on n’est pas prêt à la remise en question, si on n’est pas prêt au désaccord… Si on n’est pas prêt à la bienveillance, on n’est pas prêt à se marier. Tu vois, il faut sortir de l’idéalisation. Par contre, on est responsable et capable, parce qu’Allah, il nous donne des outils, de nourrir ce couple pour faire en sorte que tout ça, on le traverse et qu’on grandisse.

Et donc dans mes accompagnements, c’est vrai que là je t’ai parlé beaucoup du couple dans sa généralité, mais la réalité c’est que dans mes accompagnements, c’est ce que j’enseigne. Parce que des fois, cette prise de conscience, des fois, tu vois les couples une seule fois, des fois il y a besoin de plusieurs rencontres, mais la vérité, des fois une seule fois ça peut suffire. Parce que quand les prises de conscience, elles sont là, quand la volonté, elle est là, naturellement, les choses, elles s’enclenchent, en fait. Tu vois ? Toi, tu es là pour aiguiller, tu donnes un outil, tu donnes un… Tu vois ?

Noureddy
D’accord. Donc, pour résumer ce qui a été dit, là, on a un réservoir émotionnel à gérer, donc à entretenir comme un jardin, pour reprendre… Enfin, comme un jardin. Donc, tu n’as pas dit jardin, mais…

Sumeya Karine
Oui, j’ai parlé du jardin pour le coup qu’il faut arroser comme le jardin que tu arroses.

C’est vrai que par rapport au réservoir émotionnel… C’est comme si tu avais une jauge d’essence, tu vois ? Tu prends une voiture, les hommes ça va leur parler. Tu as une voiture, tu vois ? Quand elle est vide, elle ne roule plus. L’être humain, il continue d’avancer quand il est vide, mais il avance de travers, il n’est pas bien, il y a un manque, il y a un désalignement, il ne va pas bien, il est de mauvais poil. Et dans le couple, quand on est complètement vide, l’autre c’est le boomerang, parce que c’est l’autre que tu es amené à voir tous les jours, c’est l’autre… Et du coup tu vas remettre sur l’autre tous tes soucis. Le fait d’être amené à remplir ce réservoir mutuellement, On est chargé de le faire nous-mêmes avec des choses qui nous font vibrer, plaisir, etc. ça, c’est autre chose. Mais en couple, le fait de pouvoir s’apporter mutuellement et d’être capable de se remplir mutuellement, on va forcément à la station essence. Tu vois, on y retourne. Si c’est ta femme, ta station essence. Si c’est ton mari, ta station essence. Tu vois, en fait, pour l’image, c’est ça.

Noureddy
D’accord.

Sumeya Karine
Il faut remplir.

Noureddy
D’accord. Et ce réservoir émotionnel, en fait, on le remplit en fonction des rôles qui nous sont définis, tel qu’on l’a dit tout à l’heure ?

Sumeya Karine
Alors, c’est autre chose encore. C’est-à-dire, oui, bien sûr que pour une femme, un homme qui est qawām, qui veut être protecteur, etc., naturellement, elle est tournée vers lui parce que c’est quelque chose qui va la remplir, effectivement.

Mais de façon plus pragmatique et plus précise, c’est pour ça que j’ai parlé des langages de l’amour, et que je vous invite à aller chercher le livre, les langages de l’amour, ça fait partie des choses qui peuvent aider à remplir énormément. Les langages de l’amour, juste pour la faire courte, parce que ce n’est pas vraiment le sujet, mais c’est comment on se sent aimé, comment je me sens aimé, et comment l’autre se sent aimé. Il y aura cinq langages. Tu vois, tu as le toucher, tu as les paroles valorisantes, tu as les services rendus, les moments de qualité et les cadeaux. Forcément, les cinq sont agréables, mais on en a un ou deux qui est très récurrent, qui va nous nourrir plus que d’autres.

Si pour moi, par exemple, mon langage, c’est le toucher, et que toi en face, c’est les cadeaux, tu auras beau me faire des cadeaux, je vais être contente. Mais s’il n’y a pas le toucher, au bout d’un moment, je vais commencer à me vider. J’ai besoin de ressentir que ton amour passe par le toucher parce que c’est mon langage. Et vice-versa, si toi, c’est les cadeaux et que je ne t’en fais jamais, et que je vais te parler que dans mon langage. C’est comme si je parlais espagnol et tu parles chinois, tu vois ?

Alors des fois, on a le même, c’est très bien. On ne va pas rajouter un critère, on ne va pas chercher le même. Parce que le but, c’est de tous les développer et d’apprendre à communiquer avec l’autre, son époux, son épouse, dans son langage. Et ça, ça peut être un sujet de discussion pour les couples. S’il y a des personnes qui nous écoutent qui sont en couple, n’hésitez pas à aller en discuter parce que c’est un moment pour le couple, un moment de qualité où, « tiens, chérie, c’est quoi que t’aimes ? J’ai appris ça. Est-ce que tu saurais définir, me faire connaître la chose ? » Et ça donne déjà de l’importance à l’autre. Tu vois ?

Et ça, c’est quelque chose de… Je ne vais pas dire que c’est magique, parce que voilà, mais c’est magnifique. C’est un outil franchement, parce qu’on le vibre, tu vois. L’être humain, il a besoin d’être aimé, il a besoin de se sentir reconnu, valorisé, aimé. Donc, à l’intérieur du couple, c’est ce qu’on doit ressentir, où on va aller le chercher, tu vois ?

Après, tu as tes enfants, tu vas me dire, tu as tes parents, tu as ta famille, tu as tes amis, c’est pas pareil. Le couple, il a une place que nul autre ne peut avoir, il y a une connexion dans le couple que tu ne peux pas trouver ailleurs. Donc, c’est important de se sentir… et c’est là où je parle de responsabilité.

Quand on se met en couple, on est responsable. C’est-à-dire que moi, je suis responsable à 100%, et toi, tu es responsable à 100%. On n’est pas en 50-50 de responsabilité. Je t’ai choisi. Et selon ce que j’ai choisi chez toi, je suis en mesure de t’apporter. Tu vois ce que je t’ai dit de mes accompagnements ? C’est là que tu le retrouves. Parce que je t’ai choisi. Et je t’ai choisi avec tes qualités et tes défauts. Je sais que tu n’es pas parfait, et vice-versa. Et on compose tous les deux, tu vois ? C’est une danse. Et puis des fois, on se marche dessus, mais on sait que ce n’est pas la fin. On sait qu’on peut communiquer. et que c’est ce qui va nous amener à grandir. Parce qu’il ne faut pas oublier la finalité du couple.

Allah nous a créés par couple. On doit grandir dans ce couple personnellement, spirituellement, jusqu’à arriver à une certaine complétude. On parle d’abord de complémentarité, mais la réalité, si on avance dans cette complémentarité avec tous les ingrédients qu’Allah nous donne, on arrive à une complétude. Allah nous a créés d’une seule et même âme. Il y a un verset, si tu le retrouves : « On vous a créé d’une seule et même âme. » Subhanallah.

On retrouve ça. En fait, c’est très profond. Moi, je peux aller très loin là-dedans, mais ce que je veux dire, c’est que c’est dans cette entité qu’on doit… C’est une priorité, en fait. C’est une priorité. Certains vont dire que ce n’est pas une priorité mon couple, mais alors, elle est où, ta priorité ? Je veux dire, si elle est dans ton travail, ne te marie pas. Si elle est… Et même tes enfants, ça ne doit pas être la priorité. Ça ne veut pas dire que, bien sûr, tes enfants, ils viennent de ce couple. Ils sont venus après. Tu étais d’abord un homme, tu étais d’abord une femme.

Et c’est là où je te dis que dans les accompagnements, il y a aussi se retrouver. On trouve des moments, on se donne des moments, c’est pour nous. Que ce soit pour communiquer, que ce soit un week-end, que ce soit même une soirée, des fois il y a des enfants, on prend une nounou, on les donne à la maman, on trouve une solution, on se donne ce temps. Et si chacun des membres du couple se rappelle ses priorités, il n’y aura pas de problème.

Noureddy
Incha’Allah.

Sumeya Karine
Incha’Allah, tu vois ?

Après encore une fois je te dis pas il n’y aura pas de désaccord. On a nos humeurs etc. Je suis pas en train d’utopiser le truc mais ça te donne des outils, t’es rempli émotionnellement ça te donne des outils pour traverser. Un jour c’est toi qui va pas être d’humeur un jour, c’est moi qui vais pas être d’humeur, mais on va le comprendre et on va pouvoir se le dire. Tu vois la communication aussi elle va se restaurer donc voilà.

Noureddy
Magnifique. Merci beaucoup, Sumeya pour cette intervention.

Une dernière question qui me trotte dans la tête depuis le… Donc un petit moment maintenant, est-ce que tu as des couples qui viennent te consulter même si les choses vont bien ?

Sumeya Karine
Ah, c’est une bonne question. Non.

Noureddy
J’ai entendu de la part d’un ami que les thérapeutes et les psychologues, c’est une branche de métier, c’est quelque chose qu’il ne faut pas, ce sont des professionnels qu’il ne faut pas uniquement consulter quand les choses vont mal, parce que ce sont des gens qui… qui nous aident à garder le cap en fait, vraiment un petit peu comme pour reprendre la métaphore de la carte et de la boussole, donc c’est peut-être eux qui vont nous aider à recalibrer la boussole, ou peut-être redessiner la carte pour s’adapter aux changements qu’il y a.

Sumeya Karine
Oui, ce que tu soulèves c’est hyper important, c’est hyper pertinent même.

Quand je te parlais des schémas tout à l’heure, tu vois, des personnes qui viennent te voir et leurs schémas négatifs sont ancrés depuis longtemps, c’est-à-dire que là il n’y a plus de communication, plus d’intimité. C’est difficile. C’est-à-dire que ce n’est pas impossible, mais il va falloir réparer, reprendre les schémas. Depuis le début, c’est beaucoup plus compliqué que des personnes qui viennent et qui vont déjà bien, qui ont juste une petite altercation, qui voudraient tout de suite prendre ça pour voir là où le bât blesse, pour tout de suite recalibrer.

Et effectivement, ça serait bien que les personnes viennent nous voir quand ça va, pour que ça continue d’aller. Mais l’être humain, il est comme ça. C’est-à-dire qu’il faut qu’il soit en galère pour qu’il vienne te voir. C’est aussi pour ça que j’ai fait le choix d’accompagner pas uniquement les couples, parce que j’estime qu’il vaut mieux prévenir que guérir. Alors le ghayb, il appartient à Allah, tu vois. Mais le fait d’être préparé au mariage, d’être préparé à tout ce qu’on a dit, tu vois, ça permet d’entrer déjà plus ancré.

Et donc après, dans la vie de couple, ça ne garantit pas, attention. Il faut aussi arrêter l’idée du mariage garanti sans divorce. Ça aussi, c’est une cause de rupture. Parce qu’on veut tellement que ça fonctionne que déjà, soit on ne s’engage pas, ou soit, tout doit être parfait tout le temps. C’est dans les mains d’Allah. Il y avait des divorces de tout temps. Du temps du Prophète, il y avait des divorces. Donc on ne part pas dans l’idée du divorce, bien entendu. On part dans l’idée de « ce n’est pas dans mes mains, par contre ce que je peux faire aujourd’hui, et ce qui est dans mes mains, ce qu’Allah me permet d’avoir, c’est de nourrir, de construire. Oui, au jour le jour, je peux le faire, de savoir comment choisir, de savoir comment avancer », tu vois ?

Par contre, tout ce qui est du divorce, pas divorce, on sait pas. Peut-être qu’aujourd’hui ça le fait et que demain on va prendre des chemins de vie complètement différents, que nos valeurs vont peut-être se modifier, on sait pas. Donc ça, il faut lâcher prise aussi sur ça. Je pense que le Tawakkul (s’en remettre à Dieu) est vraiment d’actualité aussi pour cette question du mariage et du couple, parce qu’effectivement, le but, on veut que les couples ils durent. Oui, mais ce n’est pas dans nos mains. Il ne faut pas l’oublier. Ça aussi.

Il y a ce sujet qu’on n’a pas évoqué, mais il y a ce côté contrôle qu’on a, qu’on soit marié ou non. On veut contrôler, contrôler ce qui se passe en face, contrôler ce qui va nous arriver, contrôler comment on va rencontrer. Il faut faire les choses qui sont dans nos mains, comme tout ce qu’on a pu décrire depuis tout à l’heure, et lâcher prise sur les résultats. Ça aussi, c’est super important.

Noureddy
Donc ça, c’est le fait de se remettre à Dieu, donc le tawakkul.

Sumeya Karine
Tout à fait, tout à fait. Ça, c’est numéro un.

Noureddy
Merci beaucoup, Sumeya, pour cette intervention.

Pour conclure, à part « Les langages de l’amour », est-ce que tu aurais d’autres livres à recommander à nos auditeurs ?

Sumeya Karine
La vérité, c’est celui-là que je peux conseiller.

Il y en a d’autres, mais après, pour la différence homme-femme, il y a « Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus » . Mais dans ce livre-là, je mets un bémol. Il est très bien, il est très très bien. Mais certaines femmes vont se reconnaître dans le côté masculin et certains hommes dans le côté féminin, ça se peut. Mais ça peut être une grille de lecture, pour se comprendre.

Après, honnêtement, sur les lectures, il y avait un livre de Myriam Lakhdar, mais j’ai oublié le titre. Myriam Lakhdar, qui est aussi thérapeute de couple et qui a fait des choses magnifiques aussi, elle a écrit un livre sur quel couple veux-tu construire, ce qui te met dans ta posture d’aujourd’hui pour savoir ce que tu veux demain, qui est pas mal aussi.

Mais en termes de simplicité et d’outils à utiliser tout de suite, moi, vraiment j’en donne un, précisément « « Les langages d’amour », parce que même quelqu’un qui te dit « moi, je ne lis pas » , il peut le lire et il peut tout de suite mettre en pratique.

Noureddy
Merci Sumeya. Et pour finir, comment on peut te contacter ?

Sumeya Karine
Alors, comment on peut me contacter ? Soit par téléphone, soit via WhatsApp, soit, je ne suis pas très réseau, mais j’ai quand même un Facebook et un Instagram, donc c’est Karine Sumeya, sur Facebook et sur Insta.

Mais toujours plus joignable par téléphone et par WhatsApp. Après, voilà. En général, je suis assez réactive.

Noureddy
Merci beaucoup, Sumeya.

Sumeya Karine
Avec plaisir.

Noureddy
C’est la fin de cette émission. Merci de l’avoir écoutée. Je vous dis Salam alaykoum wa rahmatoullah et wa barakatouh. Que la paix soit sur vous.

Sumeya Karine
Salam alaykoum wa rahmatoullah.

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